mercredi, mai 03, 2006

 

Giallo devant, nero derrière (2).

"Pour son entrée en matière dans le domaine du giallo, Neo sort La queue du scorpion de Sergio Martino et un titre moins évident avec cet Homme sans mémoire qui, s’il n’est assurément pas un incontournable, reste le moyen d’avoir ce que l’on pourrait qualifier d’extrémité du genre puisque se plaçant à la lisière du giallo ! Après L'étrange vice de Madame Wardh, premier giallo réalisé par Sergio Martino à sortir sur les écrans italiens, arrive La queue du scorpion, à nouveau produit par son frère Luciano Martino. Nous sommes en 1971, l'année de l'explosion de la mode Giallo, consécutive au succès de L'oiseau au plumage de cristal de Dario Argento, sorti en 1970. Certains membres de l'équipe réunie pour La queue du scorpion peuvent déjà se targuer d'une certaine expérience dans le genre. Comme on l'a vu, Sergio Martino possède à son actif L'étrange vice de Madame Wardh, tout comme le scénariste Ernesto Gastaldi, lequel a aussi collaboré à un autre giallo : Photo interdite d’une bourgeoise de Luciano Ercoli. L'acteur George Hilton, qui tient ici le rôle principal, est une vedette du Western Spaghetti qui se reconvertit alors avec succès dans le thriller italien ; il venait de jouer dans L'étrange vice de Madame Wardh. Nous trouvons encore de nombreuses actrices apparaissant dans des Giallo sortis à quelques mois, voire semaines, d'intervalle : Anita Strindberg (Carole de Lucio Fulci), Ida Galli (Cran d’arrêt - titre vidéo - de Duccio Tessari), Janine Reynaud (L'uomo piu velenoso del cobra de Bitto Albertini)... Le Giallo connaît un engouement tel qu’il va faire de l’ombre au Western Spaghetti, de plus en plus orienté vers la grosse farce et la parodie. Nous retrouvons donc, dans La queue du scorpion, quelques faciès issus de ce genre, tel l'italien Luigi Pistilli (frère de Tuco dans Le bon, la brute et le truand) ou le patibulaire espagnol Luis Barboo (Pour une poignée de dollars). Lisa Baumer, une jeune femme vivant à Londres et mariée à un homme riche, apprend que celui-ci vient de périr dans un accident d'avion, dans des circonstances mystérieuses. On l'informe que son époux avait souscrit une assurance-vie auprès d'une compagnie grecque. Une police d'assurance... d'un million de dollars ! Avant qu'elle ne parte à Athènes pour récupérer cette somme, Lisa doit faire face à un de ses anciens amants, un drogué qui prétend détenir une lettre pouvant la faire accuser d’avoir manigancer cet «accident». Mais, ce maître-chanteur est rapidement poignardé par un inconnu… Une fois Lisa arrivée dans le Péloponnèse, d'étranges personnages la contactent : Peter Lynch, un détective à la solde de la compagnie d'assurance, et aussi Lara Florakis, la maîtresse de feu son époux... En effet, le million de dollars de Lisa Baumer aiguise bien des convoitises. Dans les rues d'Athènes, les crimes sanglants et les règlements de compte vont se multiplier ! Un assassin, vêtu de noir et armé d'un couteau à cran d'arrêt, élimine une par une toutes les personnes liées à cette affaire. Le détective Peter Lynch et l'inspecteur Savros essaient laborieusement de démêler ce mystère... La police finit par se demander si l'assassin n'est pas, en fait, un psychopathe, un maniaque sexuel qui ne s’intéresse pas à l’argent… En partant de ces bases, LA QUEUE DU SCORPION se déroule selon un scénario qui, s'il ne s'avère pas spécialement novateur, se montre solide et efficace, sachant élaborer un suspense efficace et ponctuer son récit d'évènements relançant régulièrement l'intérêt. De nouveaux personnages font leur apparition de façon étonnante, tandis que certains autres se font éliminer de manière non moins inattendue. Surtout, si son dénouement peut paraître tarabiscoté, LA QUEUE DU SCORPION n'en propose pas moins une histoire qui tient debout, et qui ne souffre pas d'invraisemblances flagrantes. Efficace dans sa narration, LA QUEUE DU SCORPION frappe aussi par sa facture technique impressionnante. La mise en scène de Sergio Martino se montre totalement professionnelle, efficace, et les séquences de terreur, sans être novatrices, sont exécutées avec un soin et un sens de l'atmosphère jamais pris en défaut. Certaines scènes se permettent même un peu de folie virtuose, tel cet étrange plan séquence filmé en plongée complète ! La photographie, surtout, s'avère magnifique, retranscrivant avec clarté et précision la lumière méditerranéenne d'Athènes, ville où ce long métrage a été en grande partie tournée. Quant à la distribution, si elle ne s'avère pas uniquement composée de très grands comédiens, elle n'en propose pas moins une galerie de figures typiques du Giallo, d'acteurs sympathiques, appréciés par les amateurs de cinéma populaire italien : George Hilton le playboy, Ida Galli la bourgeoise glacée, Luigi Pistilli le policier décontracté, Janine Reynaud la maîtresse sulfureuse, Anita Strindberg la journaliste fouineuse... Bref, un casting homogène, sans fausse note, qui participe de l'agréable moment passé par le spectateur devant ce thriller à l’ambiance horrifique et insolite. La queue du scorpion correspond donc à ce que le spectateur est en droit d'attendre d'un bon Giallo : s'il ne se montre ni particulièrement original, ni particulièrement innovant, la qualité technique de sa conception et son interprétation d'un bon niveau en font une solide production, soignée et rigoureuse, méritant de se voir considérée comme une des belles réussites de son genre. En France, jusqu'à maintenant, le Giallo n'a pas été un genre réellement promu en DVD. Au gré de collections dédiées à certains metteurs en scène, plusieurs titres ont néanmoins déjà fait surface. Ainsi TF1 vidéo, lorsqu'il s'était intéressé à Dario Argento, avait publié L'oiseau au plumage au plumage de cristal, Le chat à neuf queues et Tenebres. Au fil de sorties consacrées à Mario Bava, Films sans Frontières nous a proposé La fille qui en savait trop, One plus One s'est fendu d'un Une hache pour la lune de (titre DVD) tandis que, dans ses sorties accompagnant les numéros de Mad Movies, Opening offrit L'ile de l’épouvante. Plus tard, Wild Side sort prudemment Les frissons de l’angoisse, le plus célèbre giallo de Dario Argento. Une tentative qui restera isolée chez cet éditeur... Enfin, Néo, dans la foulée de ses DVD consacrés à Lucio Fulci, a proposé deux de ses thrillers. A savoir le surnaturel L'emmurée vivante et le très gore L'éventreur de new York. Bref, hors de ces trois grands noms de l'horreur à l'italienne, point de salut ! Pourtant, le Giallo est un genre dont la production pléthorique dépasse celle de ces trois grands noms. Heureusement, Néo Publishing lance une nouvelle collection spécifiquement dédiée à ce genre. Elle adopte un visuel réussi et facilement identifiable, s'inspirant des couvertures de ces romans policiers italiens dits "Giallo" qui ont inspiré la dénomination du genre cinématographique. Les deux premiers titres de cette collection sont L'homme sans mémoire de Duccio Tessari et La queue du scorpion, que nous allons chroniquer ici. La queue du scorpion se voit proposée dans une très belle copie 2.35, en 16/9. Si nous pouvons relever une ou deux poussières, ou encore remarquer, de loin en très loin, des arrières plans très légèrement agités, nous constatons aussi que l'image de ce DVD s'avère époustouflante ! Définition affûtée, fixité impeccable, très belles couleurs et lumière parfaite... On frôle le sans-faute, et, pour un film ayant plus de 30 années au compteur, on peut parler d'un vrai miracle ! Au vu des cadrages et de l'aspect général de l'image, il s'agit de la même copie que celle employée pour le disque de La queue du scorpion sorti en Zone 1 par NoShame. Celui-ci, bien que très correct, n’offre pas une définition aussi pointue que le disque français. Bravo à Néo, donc ! En bande-son, nous trouvons les pistes italienne et française d'époque, dans des mixages monos d’origine codés sur deux canaux, de très honnête facture. La version italienne est munie de sous-titres non amovibles. Globalement, cette section sonore s'avère conforme à nos attentes et n'appelle pas de commentaire particulier... DVD NoShame DVD Neo Publishing En supplément, nous retrouvons quelques bonus disponible sur le disque NoShame, à savoir la bande-annonce italienne d'époque ainsi que des affiches et des photos d'exploitation. Néanmoins, Néo nous propose aussi des suppléments intéressants et exclusifs, à commencer par un commentaire audio en italien sous-titré, donnant la parole au scénariste Ernesto Gastaldi. Ayant collaboré à de nombreux giallos, celui-ci avoue néanmoins qu’il ne se rendait pas sur les tournages, et il n'a donc pas énormément d'informations à communiquer sur le film en lui-même. Le modérateur du commentaire ne se laisse pas démonter et lui pose de nombreuses questions sur le genre en général, ce qui permet d'obtenir un commentaire intéressant pour le spectateur français, ne souffrant à aucun moment de blancs ou de relâchement dans le débit de parole. Un autre supplément nous propose une nouvelle interview de 19 minutes avec Sergio Martino, lequel nous parle à la fois de La queue du scorpion et de sa carrière récente. Par contre, nous ne retrouvons pas la sympathique featurette conçue par NoShame, qui proposait des entretiens en italien sous-titré avec George Hilton, les deux frères Martino, ainsi qu'avec Ernesto Gastaldi. Néanmoins, en fin de compte, c'est l'édition Néo qui s'avère la plus informative au travers de ses bonus... Bref, pour les francophones, cette édition Néo est une réussite, et elle fait démarrer cette collection Giallo du bon pied ! Le seul petit reproche qui pourrait être fait concerne le prix. Au vu des tarifs des dernières sorties Néo, nous l'aurions bien vu quelques euros plus bas, aux alentours de 15 euros plutôt que de 20. Ce qui aurait attiré plus facilement les clients vers cette nouvelle série... Néanmoins, même à ce tarif-là, il s'agit d'un achat tout à fait honnête."

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